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MAE, extradition et consentement de l’État autorisant la remise : précisions sur les compétences de la chambre de l’instruction

Pénal - Procédure pénale
15/12/2020
La Cour de cassation a précisé, dans un arrêt du 2 décembre 2020, qu’en matière d’extradition, la chambre de l’instruction n’a pas à se pencher sur le consentement de l’autorité ayant remis préalablement la personne en vertu d’un MAE.
Un homme est remis aux autorités judiciaires françaises par les autorités belges en exécution d’un mandat d’arrêt européen (MAE). Il est condamné à une peine de dix ans d’emprisonnement par le tribunal correctionnel.
 
Un an plus tard, les autorités judiciaires marocaines adressent aux autorités françaises, conformément à la convention bilatérale d’entraide judiciaire en matière pénale du 18 avril 2008, une demande formelle d’extradition du condamné aux fins de mise à exécution d’une peine de dix ans d’emprisonnement. La demande d’extradition lui a été notifiée. Il a déclaré ne pas l’accepter.
 
La cour d’appel donne un avis défavorable à cette demande. Elle affirme que la chambre du conseil du tribunal de première instance francophone de Bruxelles « n’a pas été sollicitée pour donner son consentement à la demande d’extradition faisant suite à la remise sur mandat d’arrêt européen qu’elle a autorisée ». Ainsi, « il ne peut être soutenu que la chambre de l’instruction doit donner un avis sur l’extradition sans tenir compte de la position des autorités belges dont l’autorisation pourrait être recueillie en toute fin de procédure au stade de la prise éventuelle du décret d’extradition alors qu’il n’est pas établi que c’est bien l’autorité judiciaire ayant préalablement accordé la remise à la France qui sera sollicitée pour donner son consentement ».
 
Un pourvoi est formé par le procureur général près la cour d’appel de Douai. Il soutient notamment qu’en affirmant que le consentement à la ré-extradition vers le Maroc relevait de la compétence de la chambre du conseil de première instance francophone de Bruxelles, la cour d’appel a outrepassé ses pouvoirs.
 
La Cour de cassation censure l’arrêt de la cour d’appel. Elle rappelle que :
- l’article 696-15 du Code de procédure pénale prévoit que la chambre de l’instruction donne un avis défavorable à l’extradition si elle estime que les conditions légales ne sont pas remplies ou qu’il y a une erreur évidente ;
- l’article 695-21 II du même Code dispose que lorsque le ministère public qui a délivré un MAE a obtenu la remise de la personne recherchée, elle « ne peut être extradée vers un État non membre de l’Union européenne sans le consentement de l’autorité compétente de l’ État membre qui l’a remise ».
 
Mais, la Haute juridiction précise que l’arrêt de la chambre de l’instruction « ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ». Le consentement de l’État étranger à l’extradition de la personne remise en vertu d’un MAE à un État non membre de l’UE « n’entre pas dans les conditions légales visées par l’article 696-15 du Code de procédure pénale ».
 
Source : Actualités du droit