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Justice 2018-2022 (volet pénal) : les changements relatifs aux actes d’investigation (droit commun)

Pénal - Procédure pénale
15/04/2019
Garde-à-vue, perquisitions, réquisitions, écoutes téléphoniques, géolocalisation… Tous ces actes d’investigation sont affectés par la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Le point sur les dispositions relatives aux actes de police judiciaire réalisés en enquête ou sur commission rogatoire, pour des infractions de droit commun.
La réforme en profondeur de notre système judiciaire pénal attendra. Mais de très nombreux articles de la loi de de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (L. n° 2019-222, 23 mars 2019, JO 24 mars) affectent le déroulement des investigations, qu’il s’agisse d’uniformiser certains régimes d’actes ou de renforcer les pouvoirs des enquêteurs.
Et, ce, indépendamment des censures décidées par le Conseil constitutionnel (Cons. const., 21 mars 2019, n° 2019-778 DC, JO 24 mars ; PJL Justice (volet pénal) : la liste des validations et censures constitutionnelles en matière pénale, Actualités du droit, 21 mars 2019. Bon nombre de ces mesures sont d’ores et déjà entrées en vigueur, bien que certaines d’entre elles aient vocation à ne s’appliquer qu’à compter du 1er juin 2019.
 
Principe directeur du procès pénal (vie privée). — Il convient d’emblée de prendre acte de l’insertion, à compter du 1er juin 2019, d’un nouvel alinéa 6 au sein du III de l’article préliminaire du Code de procédure pénale. Le texte consacre explicitement un « nouveau » principe directeur du procès pénal : les mesures portant atteinte à la vie privée ne peuvent être prises, sur décision ou sous le contrôle effectif de l’autorité judiciaire, que si elles sont, au regard des circonstances de l’espèce, nécessaires à la manifestation de la vérité et proportionnées à la gravité de l’infraction.
 
Dossier numérique de procédure. — L’article 50, I de la loi de programmation a créé l’article 801-1 du Code de procédure pénale, qui permet la constitution des dossiers de procédure sous forme dématérialisée : le dossier de la procédure peut désormais être intégralement conservé sous format numérique, dans des conditions sécurisées, sans nécessité d'un support papier. Il est entré en vigueur le 25 mars 2019 (décret et arrêté d’application à venir néanmoins).
Tous les actes mentionnés dans le Code de procédure pénale peuvent ainsi être établis ou convertis sous format numérique. Et, ce, qu'il s'agisse des actes d'enquête, des actes d'instruction, des décisions juridictionnelles ou de toute autre pièce de la procédure.
Ne sont pas néanmoins pas concernées, les dispositions du Code de procédure pénale qui procèdent à une distinction entre les actes originaux et leurs copies, celles qui prévoient la certification conforme des copies ou bien encore celles relatives au placement sous scellés (y compris sous scellés fermés, des documents, contenus multimédia ou données dès lors qu'ils sont versés au sein de ce dossier).
Si les actes établis sous format numérique doivent être signés, ils font l'objet, quel qu'en soit le nombre de pages et pour chaque signataire, d'une signature unique sous forme numérique, selon des modalités techniques qui garantissent que l'acte ne peut plus ensuite être modifié. Ces actes n'ont pas à être revêtus d'un sceau.
Quelques modifications de coordination sont prévues. Il en est ainsi des dispositions relatives :
  • au PV de constat des infractions relevant de la procédure de l’amende forfaitaire (C. pr. pén., art. 530-6 et 495-22) : le PV visé est celui « établi sous forme numérique » et non plus « revêtu d'une signature numérique ou électronique » ;
  • à l’élection de domicile des témoins (C. pr. pén., art. 706-57) : la mention de l’adresse personnelle est faite dans un « registre ouvert à cet effet et tenu sous format papier ou numérique » (suppression des cotes et paraphes).
 
 

1) Cadre des investigations


Dépaysement de l’enquête (cour d’appel). — L’article 51, II de la loi de programmation complète les dispositions actuelles relatives à la délocalisation de l’enquête. Ceci, pour prévoir que si la personne en cause est en relation avec des magistrats ou fonctionnaires de la cour d’appel (et non plus seulement, comme aujourd’hui, de la juridiction de 1re instance), le procureur général peut transmettre la procédure au procureur général près la cour d’appel la plus proche, afin que celui-ci la transmette au procureur de la République auprès du tribunal de grande instance le plus proche (C. pr. pén., art. 43, al. 2, 2nde phrase). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019.
 
Enquête sous pseudonyme. — L’article 45 de la loi de programmation créé, à compter du 1er juin 2019, un nouveau chapitre au sein du Code de procédure pénale, relatif à l’enquête sous pseudonyme. L’article 230-46 du Code de procédure pénale en unifie le régime, au sein d’une disposition unique. Le texte s’appliquera aux investigations relatives aux crimes et aux délits punis d’une peine d’emprisonnement commis par la voie des communications électroniques, aux seules fins de les constater et lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction le justifient. L’anonymisation dans certains actes de la procédure est également étendue au bénéfice des agents de police judiciaire (voir Justice 2018-2022 (volet pénal) : les changements relatifs aux statuts des enquêteurs, Actualités du droit, 9 avr. 2019).
 
Continuation de l’enquête après le réquisitoire introductif. — Le dispositif du « sas » lors de l’ouverture de l’information permet, sur autorisation du procureur de la République, la poursuite de certains actes d'enquête postérieurement à l'ouverture d'une information judiciaire. Rappelons que cette dérogation au dessaisissement du parquet quant à la direction des investigations existait déjà en matière de terrorisme (C. pr. pén., art. 706-24-2, abrogé). L’article 53, I de la loi de programmation généralise ce dispositif au sein d’un nouvel article 80-5 du Code de procédure pénale, avec entrée en vigueur immédiate (25 mars 2019).
Désormais, ce mécanisme est possible pour les crimes et pour les délits punis d’une peine supérieure ou égale à trois ans d’emprisonnement. Ainsi, lorsqu’il requiert l’ouverture d’une information, le procureur de la République peut, si la recherche de la manifestation de la vérité nécessite que les investigations en cours ne fassent l’objet d’aucune interruption, autoriser les officiers et agents de police judiciaire des services ou unités de police judiciaire qui étaient chargés de l’enquête à poursuivre certaines opérations. Ceci, pendant une durée maximale de quarante-huit heures à compter de la délivrance du réquisitoire introductif. Comme précédemment, le juge d’instruction peut à tout moment mettre un terme à ces opérations.
Cette autorisation fait l’objet d’une décision écrite, spéciale et motivée, qui mentionne les actes dont la poursuite a été autorisée. L’autorisation délivrée par le procureur de la République n’est versée au dossier de la procédure qu’en même temps que les procès-verbaux relatant l’exécution et constatant l’achèvement des actes dont la poursuite a été autorisée et qui ont, le cas échéant, été prolongés par le juge d’instruction. Pour mémoire, dans le dispositif antérieur, le juge d'instruction pouvait décider, si les nécessités de l'instruction l'exigeaient, de ne pas faire figurer au dossier la décision pour le temps du déroulement des opérations prolongées.
Les mesures pouvant être prolongées après le réquisitoire sont les suivantes :
  • les écoutes téléphoniques initiées en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-95). Le projet de loi visait initialement les nouvelles dispositions, censurées par le Conseil constitutionnel (voir infra), qui permettaient l’interception des correspondances en enquête de flagrance et en enquête préliminaire ;
  • la géolocalisation (C. pr. pén., art. 230-32 à 230-35) ;
  • les livraisons surveillées en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-80) ;
  • l’infiltration en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-81) ;
  • l’interception des correspondances électroniques en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-95-1) ;
  • le recours à l’IMSI-Catcher (recueil des données techniques de connexion ; C. pr. pén., art. 706-95-20, anc. art. 706-95-4 )
  • les sonorisations et fixation d’images en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-96) ;
  • la captation de données informatiques en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-102-1).
Le Conseil constitutionnel a validé avec réserve les modifications de l’article 80-5 du Code de procédure pénale.
Pour le Conseil constitutionnel, les nouvelles dispositions visent à éviter que certains actes d'enquête soient interrompus du seul fait de l'ouverture d'une information judiciaire. Elles sont autorisées par le procureur pour 48 heures au plus et le juge d’instruction peut y mettre fin à tout moment. Dès lors, « elles poursuivent ainsi l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions ». Pour autant, pour les actes d'enquête subordonnés à une autorisation préalable du JLD, la prolongation permise par le nouveau dispositif ne saurait, sans méconnaître le droit au respect de la vie privée, l'inviolabilité du domicile et le secret des correspondances, conduire à excéder la durée initialement fixée par le JLD. Sous cette réserve, le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles en cause (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 209-215).
 
Continuation de l’enquête après la plainte avec CPC. — Lorsque le juge d’instruction est saisi par une plainte avec constitution de partie civile, il lui appartient de la communiquer au parquet pour qu’il prenne ses réquisitions. Ce principe n’est pas modifié, mais une seconde phrase est ajoutée à l’alinéa 1er de l'article 86 du Code de procédure pénale (art. 53, III de la loi de programmation, avec entrée en vigueur immédiate). Le procureur de la République peut désormais demander au juge d'instruction un délai supplémentaire de trois mois pour permettre la poursuite des investigations avant de faire connaître ses réquisitions. La décision du juge d'instruction constitue une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours.
Rappelons que cette disposition, entrée en vigueur le 25 mars 2019, a été adoptée en 2nde lecture à l’Assemblée nationale. Le projet de loi portait de trois à six mois le délai au terme duquel une victime peut valablement saisir le juge d’instruction. Cette systématisation ayant été considérée comme excessive, une voie médiane était trouvée en conservant le délai de trois mois et en ouvrant « en contrepartie » au procureur de la République la possibilité de solliciter du juge d’instruction un délai complémentaire de trois mois pour poursuivre les investigations en cours.
 
Durée de l’enquête de flagrance (censurée). — L’article 49, I du projet de loi de programmation avait prévu un allongement de la durée de l’enquête de flagrance. Il était prévu de modifier l’article 53 du Code de procédure pénale de manière à ce que les investigations puissent être menées pendant seize jours en matière criminelle ou dans le cadre de la délinquance et de la criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-73 et 706-73-1). En outre, il était projeté d’insérer un nouvel alinéa permettant au procureur de la République d’autoriser, par décision écrite et motivée, la prolongation de l’enquête pour une durée maximale de huit jours supplémentaires. Ceci, à l’issue du délai de huit jours et lorsque des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité ne pouvaient être différées, pour les investigations portant sur un délit puni d’une peine supérieure ou égale à trois ans d’emprisonnement.
Mais pour le Conseil constitutionnel (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 185-191), compte tenu des pouvoirs attribués aux enquêteurs en flagrance (arrestation d’initiative, perquisitions et saisies sans consentement ni autorisation judiciaire préalable notamment), lesquels ne sont justifiés que par la proximité avec la commission de l'infraction, le législateur n'a, en adoptant les dispositions contestées, pas prévu des garanties légales de nature à assurer une conciliation équilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, le droit au respect de la vie privée et l'inviolabilité du domicile.
 
 

2) Réquisitions à personne qualifiées et scellés



Réquisitions par APJ. — L’article 47, IV, V et VII de la loi de programmation modifie largement, avec entrée en vigueur immédiate, les compétences des agents de police judiciaire (APJ), en leur permettant d’accomplir certains actes de réquisition jusque-là réservés aux officiers de police judiciaire (OPJ).
Désormais, dans le cadre de l’enquête de flagrance et de l’enquête préliminaire, l’APJ peut, sous le contrôle de l’OPJ, avoir recours à toutes personnes qualifiées :
  • en vue de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques. Sur instructions du procureur de la République et sous le contrôle de OPJ, l’APJ peut désormais également donner connaissance des résultats des examens techniques et scientifiques aux personnes suspectées et aux victimes (C. pr. pén., art. 60, al. 1er et in fine et 77-1 ) ;
  • d’obtenir des informations intéressant l'enquête contenues dans un système informatique ou un traitement de données nominatives (C. pr. pén., art. 60-1 et 77-1-1) ;
  • toujours sous le contrôle de l’OPJ, et intervenant sur réquisition du procureur de la République préalablement autorisé par ordonnance du juge des libertés et de la détention, en matière de télécommunications (C. pr. pén., art. 60-2  et  77-1-2) ;
  • pour procéder à l’ouverture des scellés et réaliser une copie des objets qui sont le support de données informatiques (C. pr. pén., art. 60-3 et 77-1-3).
Dans le cadre de l’enquête préliminaire, l’APJ peut aussi désormais, sur autorisation du procureur de la République, procéder aux opérations de prélèvements externes (C. pr. pén., art. 76-2).
Lors de l’examen de constitutionnalité a priori, le Conseil constitutionnel avait noté que les APJ ne peuvent effectuer ces actes que sous le contrôle d'un OPJ et/ou sur autorisation du procureur de la République. Il a estimé que, dès lors, ces dispositions ne remettent en cause ni la direction et le contrôle de la police judiciaire par l'autorité judiciaire, ni au droit au respect de la vie privée, ni à aucune autre exigence constitutionnelle (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 172-173).
 
Dépistage alcool et stupéfiants. — Les OPJ et, désormais les APJ, peuvent, d’initiative, requérir un médecin, un interne en médecine, un étudiant en médecine autorisé à exercer la médecine titre de remplaçant ou un infirmier pour effectuer une prise de sang en vue d’établir la preuve d’une conduire en état alcoolique (C. route, art. L. 234-4) ou d’un usage de stupéfiants (C. route, art. L. 235-2). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019.
Il n’en résulte, pour le Conseil constitutionnel, aucune méconnaissance des droits de la défense, ni atteinte à une autre exigence constitutionnelle (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 208).
 
Réquisitions aux fins d’obtention des données informatiques. — Certaines formulations des articles 60-1 et 77-1-1 du Code de procédure pénale sont retouchées pour appréhender une future réglementation des formes de la remise numérique des informations. Ainsi, la remise numérique des informations pourra « le cas échéant [se faire] selon des normes fixées par voie réglementaire » (art. 47, VIII de la loi de programmation). Dans le prolongement, le fait de s’abstenir de répondre à cette réquisition sera pénalement sanctionnée non seulement si elle n’est pas effectuée, comme actuellement, dans les meilleurs délais, mais aussi, désormais, « s’il y a lieu selon les normes exigées » (C. pr. pén., art. 60-1, al. 2).
En revanche, l’article 47, VI du projet de loi prévoyait l’insertion d’un nouvel alinéa au sein de l’article 77-1-1 du Code de procédure pénale. Ceci, pour prévoir que la réquisition délivrée en vue d’obtenir une information intéressant une enquête préliminaire et issue d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives pouvait être délivrée sans autorisation du procureur si la réquisition était adressée à un organisme public ou si son exécution donnait lieu à des frais de justice d’un montant inférieur à un seuil fixé par voie réglementaire. Pour le Conseil constitutionnel, ces réquisitions pouvant porter sur toute information relative à la vie privée et être adressées à toutes personnes sans autorisation du procureur de la République, dans le cadre de l'enquête préliminaire, le législateur a méconnu l'exigence de direction et de contrôle de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire résultant de l'article 66 de la Constitution (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 174-175).

 

3) Perquisitions et visites

 
Perquisition sans consentement en enquête préliminaire. — L’article 49 de la loi de programmation abaisse le quantum de la peine encourue en matière délictuelle (qui passe de 5 à 3 ans) pour permettre, en enquête préliminaire, sur autorisation du JLD, une perquisition sans le consentement de la personne chez qui elle a lieu (C. pr. pén., art. 76, al. 4).
Pour le Conseil constitutionnel (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 192-193), le législateur n'a pas, ce faisant, opéré une conciliation déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, le droit au respect de la vie privée et l'inviolabilité du domicile.
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019.
 
Requête en nullité de la perquisition. — Rare mesure tendant explicitement à renforcer les droits de la défense, l’article 49, V de la loi de la loi de programmation créé l’article 802-2 du Code de procédure pénale. Ce texte consacre le droit, pour la personne ayant fait l’objet d’une perquisition ou d’une visite domiciliaire d’en demander l’annulation au juge des libertés et de la détention (JLD), si elle n’a pas été poursuivie devant une juridiction d’instruction ou de jugement après un délai de 6 mois à compter de l’accomplissement de la mesure.
Le JLD peut être saisi dans un délai d’un an à compter de la date à laquelle la personne a fait l’objet de la mesure contestée. La requête n’a aucun effet interruptif ou suspensif sur l’enquête ou l’instruction en cours.
Le JLD statue dans un délai d’un mois à compter de la réception de la requête, après avoir recueilli les observations écrites du procureur, du requérant et, le cas échéant, de son avocat. Ce délai peut être raccourci à 8 jours sur réquisitions écrites du parquet. Le JLD statue par ordonnance motivée, susceptible d’appel devant le président de la chambre de l’instruction (10 jours à compter de sa notification).
La requête doit être formée par déclaration au greffe de la juridiction où la procédure a été menée ou dans le ressort de laquelle la mesure a été réalisée. Mais si la perquisition a été menée dans le cadre d’une procédure au cours de laquelle d’autres personnes ont été poursuivies, la demande d’annulation est transmise soit au président de la chambre de l’instruction compétente, soit au président de la juridiction de jugement saisie. Le requérant ne peut prétendre à la mise à disposition que des seules pièces de la procédure se rapportant à la perquisition qu’il conteste.
Le Conseil constitutionnel a émis une réserve d’interprétation destinées à préserver la garantie d’impartialité :  lorsque la décision contestée en application de l'article 802-2 a été ordonnée par un JLD, ce juge ne saurait, sans méconnaître le principe d'impartialité, statuer sur la demande tendant à l'annulation de sa décision (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 196-199).
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019, mais l’annulation ne peut être demandée que pour les perquisitions réalisées à compter de cette date (art. 109, XII de la loi de programmation). Pour le Conseil constitutionnel, cette différence de traitement par rapport aux perquisitions réalisées avant cette date, repose sur une différence de situation et est en rapport avec l’objet de la loi. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi devait donc être écarté (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 200).
 
Visite des navires dans les eaux territoriales. — Un paragraphe III bis est inséré à l’article 78-2-2 du Code de procédure pénale, par l’article 49, IV de la loi de programmation.
Aux fins de recherche et de poursuite des infractions de terrorisme, de prolifération/vente d’armes et d’explosifs, de vol, de recel et de trafic de stupéfiants (C. pr. pén., art. 78-2-2, I), les OPJ, assistés par des APJ et APJ adjoints peuvent accéder à bord et procéder à une visite de certains navires. L’OPJ responsable de la visite doit rendre compte du déroulement des opérations au procureur de la République et l’informe « sans délai » de toute infraction constatée.
Sont concernés :
  • les navires présents en mer territoriale, se dirigeant ou ayant déclaré leur intention de se diriger vers un port ou vers les eaux intérieures ;
  • les navires présents en amont de la limite transversale de la mer ;
  • les bateaux, engins flottants, établissements flottants et matériels flottants se trouvant dans la mer territoriale ou en amont de la limite transversale de la mer, ainsi que sur les lacs et plans d’eau.
La visite doit se dérouler en présence du capitaine ou de son représentant. À cet égard, le texte précise qu’est considérée comme le capitaine, la personne qui exerce, de droit ou de fait, le commandement, la conduite ou la garde du navire, du bateau, de l’engin flottant, de l’établissement flottant ou du matériel flottant lors de la visite.
La visite comprend l’inspection des extérieurs, ainsi que des cales, des soutes et des locaux. La visite des locaux spécialement aménagés à un usage d’habitation et effectivement utilisés comme résidence ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires.
Le navire et autres flottants ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite, dans la limite de douze heures.
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019.
 
Extension de la protection des cabinets et domicile des avocats. — L’article 49, VI de la loi de programmation étend la protection accordée, s’agissant des perquisitions, aux cabinets et domiciles des avocats, ainsi que dans les locaux de l'Ordre des avocats ou des caisses de règlement pécuniaire des avocats (CARPA).
Ceci, que la mesure ait été réalisée sur le fondement de la procédure pénale de droit commun (C. pr. pén., art. 56-1) ou en application d’un autre code ou d’une loi spéciale.
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019.
 
Entrée dans un domicile aux fins d'exécution d'un ordre de comparaître (censurée). — Le projet de loi de programmation envisageait de renforcer les dispositions relatives à la comparution par la force publique au cours de l’enquête (C. pr. pén., art. 78).
Il s’agissait de prévoir qu’en exécution de l’autorisation du procureur, l’agent chargé de procéder à la comparution par la force publique pouvait, à cette seule fin, pénétrer dans le ou les domiciles des personnes concernées après 6 h et avant 21 h, les perquisitions et saisies dans ces domiciles pouvant se dérouler dans les conditions des articles 56 et 76 du Code de procédure pénale.
Ces dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 194-195), compte tenu du champ de l'autorisation contestée et de l'absence d'autorisation d'un magistrat du siège, le législateur n'a pas assuré une conciliation équilibrée entre la recherche des auteurs d'infractions et le droit à l'inviolabilité du domicile.
 
 

4) Garde-à-vue

 
Prolongation de la garde-à-vue et défèrement. — L’article 48, I de la loi de programmation modifie les causes de prolongation de la garde-à-vue (C. pr. pén., art. 63, II, al. 2). La mesure peut désormais aussi être prolongée uniquement pour permettre la présentation de la personne devant l'autorité judiciaire lorsqu’il n’existe pas de « petits dépôts » (locaux du tribunal relevant de C. pr. pén., art. 803-3).
De plus, désormais, la prolongation de la garde-à-vue, pour une nouvelle durée de 24 heures, sur autorisation du parquet, n’est plus nécessairement subordonnée au défèrement de la personne. Le procureur de la République peut néanmoins subordonner son autorisation à la présentation de la personne devant lui (C. pr. pén., art. 62, II).
Depuis le 25 mars 2019, le principe et l’exception sont donc inversés par rapport au droit antérieur. Rappelons que jusqu’ici, le principe était que l'autorisation du parquet de prolonger de 24h la garde-à-vue ne pouvait être accordée qu'après présentation de la personne au procureur de la République. Cette présentation pouvait néanmoins être réalisée par l'utilisation d'un moyen de télécommunication audiovisuelle. Ce n’était qu’à titre exceptionnel, par une décision écrite et motivée, que la prolongation pouvait avoir lieu sans présentation préalable.
Ces dispositions ont été déclarées conformes à la Constitution, après que le Conseil constitutionnel ait listé les pouvoirs de contrôle du procureur en la matière (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 179-181).
 
Limitation de l’information de l’avocat lors des transports. — L’article 48, III de la loi de programmation, entré en vigueur le 25 mars 2019, modifie l’étendue du droit à l’assistance d’un avocat. Désormais, l’avocat n’est informé sans délai du transport de son client sur un autre lieu qu’en cas d’audition de ce dernier, de reconstitution ou de séance d’identification des suspects dont il fait partie (« tapissage » ; C. pr. pén., art. 61-3). Rappelons que l’article 63-4-3-1 du Code de procédure pénale, créé par la loi du 3 juin 2016 (art .64, L. n° 2016-731, 3 juin 2016, JO 4 juin), prévoyait jusqu’ici que si la personne gardée-à-vue était transportée sur un autre lieu, son avocat devait en être informé sans délai.
Il n’y a ici pas d’atteinte aux droits de la défense selon le Conseil constitutionnel. Ceci, d’une part, dès lors que l’obligation d’information sans délai vaut lorsque la personne doit être entendue et que, d’autre part, lorsque l’avocat n’a pas à être informé, les enquêteurs ne peuvent, à l’occasion du transport, ni interroger la personne gardée-à-vue, ni recueillir ses déclarations (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 182).
 
Expérimentation de l’enregistrement de la notification des droits. — L’article 50, II de la loi de programmation prévoit qu’à titre expérimental, les services ou unités de police judiciaire pourront procéder à un enregistrement sonore ou audiovisuel de la notification des droits des personnes entendues, arrêtées ou placées en garde-à-vue.
Cette « expérimentation de l’oralisation » dispensera les enquêteurs de constater par procès-verbal le respect de ces formalités. L’enregistrement sera conservé sous format numérique dans des conditions sécurisées et pourra être consulté sur simple demande en cas de contestation.
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 25 mars 2019, mais leur mise en application suppose que les modalités en soient définies par voie réglementaire (par arrêté à venir).
L’expérimentation est prévue pour 3 ans (entre le 1er janvier 2019 et le 1er janv. 2022), avec remise d’un rapport d’évaluation au Parlement, au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation.
Pour le Conseil constitutionnel, l’exigence de conservation de l’enregistrement et la possibilité de le consulter sur simple demande en cas de contestation suffisent pour considérer qu’il n’y a pas d’atteinte aux droits de la défense (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 201-204).
 
Garde-à-vue et audition libre du majeur protégé. — L’article 48, IV de la loi de programmation modifie le régime de garde-à-vue des personnes faisant l’objet d’une mesure de protection juridique. Les nouvelles dispositions entreront en vigueur le 1er juin 2016. En créant ce régime spécifique, le législateur n’a, selon le Conseil constitutionnel, pas porté atteinte au principe d’égalité devant la loi au détriment des personnes non protégées pourtant atteintes de troubles mentaux ou hors d’état de manifester leur volonté (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 183-184).
Aux termes du nouvel article 706-112-1 du Code de procédure pénale, lorsque les éléments recueillis au cours de sa garde-à-vue font apparaître que la personne fait l’objet d’une mesure de protection juridique, l’OPJ ou l’APJ doit en aviser le curateur ou le tuteur. S’il est établi que la personne bénéficie d’une mesure de sauvegarde de justice, il faudra, s’il y a lieu aviser le mandataire spécial désigné par le juge des tutelles.
Si la personne n’est pas assistée d’un avocat, le curateur, le tuteur ou le mandataire spécial peuvent désigner un avocat ou demander qu’un avocat soit désigné par le bâtonnier. Si la personne n’a pas fait l’objet d’un examen médical, ils pourront en demander la réalisation.
Sauf circonstance insurmontable, mentionnée au procès-verbal, ces diligences devront intervenir au plus tard dans un délai de 6 heures à compter du moment où est apparue l’existence de la mesure de protection.
Toutefois, le procureur de la République pourra, à la demande de l’OPJ, décider que l’avis sera différé ou ne sera pas délivré si cette décision est, au regard des circonstances, indispensable afin de permettre le recueil ou la conservation des preuves ou de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne.
 
Corrélativement (art. 48, V de la loi de programmation), la liste des personnes que la personne gardée-à-vue peut faire prévenir est modifiée, les termes de curateur et tuteur étant supprimés (C. pr. pén., art. 63-2, I).
Des dispositions similaires aux précédentes sont prévues dans le cadre de l’audition libre du majeur protégé, à l’article 706-112-2 du Code de procédure pénale. Ce texte entre également en vigueur le 1er juin 2019.
Ainsi, lorsque les éléments recueillis au cours d’une procédure concernant un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement font apparaître qu’une personne devant être entendue librement (C. pr. pén., art. 61-1) fait l’objet d’une mesure de protection juridique, l’officier ou l’agent de police judiciaire en avise par tout moyen le curateur ou le tuteur, qui peut désigner un avocat ou demander qu’un avocat soit désigné par le bâtonnier pour assister la personne lors de son audition.
Mais point de nullité si le tuteur ou le curateur n’a pu être avisé et si la personne entendue n’a pas été assistée par un avocat ; il est uniquement prévu que les déclarations de cette personne ne peuvent servir de seul fondement à sa condamnation.
On mentionnera enfin que la formulation du premier alinéa de l’article 706-113 du Code de procédure pénale est revue, sans remettre véritablement en question le fond. Le texte prévoira, à compter du 1er juin 2019, que « lorsque la personne fait l'objet de poursuites, le procureur de la République ou le juge d'instruction en avise le curateur ou le tuteur ainsi que le juge des tutelles ».
Pour mémoire, ce nouveau dispositif fait suite à la censure constitutionnelle du premier alinéa de l’article 706-113 du Code de procédure pénale. Le Conseil constitutionnel, saisi sur QPC (Cass. crim., 19 juin 2018, n° 18-80.872, P+B), avait déclaré la non-conformité du texte en ce qu’il n’imposait pas aux autorités policières ou judiciaires d’aviser le tuteur ou le curateur d’un majeur protégé de son placement en garde-à-vue (Cons. const., 14 sept. 2018, n° 2018-730 QPC, JO 15 sept.).
 
 

5) Géolocalisation en temps réel


L’article 44 de la loi de programmation modifie plusieurs règles fixant le régime de la géolocalisation en temps réel (champ d’application, durée et motivation de la décision). L’ensemble de ces changements a été validé par le Conseil constitutionnel, selon lequel le législateur a opéré une conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles en cause (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 148-150). Ceci, après avoir rappelé
  • la définition de la géolocalisation : « mesure de police judiciaire consistant à surveiller une personne au moyen de procédés techniques en suivant, en temps réel, la position géographique d'un véhicule que cette personne est supposée utiliser ou de tout autre objet, notamment un téléphone, qu'elle est supposée détenir » ;
  • les droits mis en jeu : pas d'acte de contrainte sur la personne visée, ni d'atteinte à son intégrité corporelle, mais atteinte à la vie privée qui résulte de la mise en œuvre de ce dispositif réside dans la surveillance par localisation continue et en temps réel de la personne, le suivi de ses déplacements dans tous lieux publics ou privés, ainsi que dans l'enregistrement et le traitement des données ainsi obtenues ;
  • les garanties encadrant le recours à la mesure, liées à la direction et le contrôle des opérations par l'autorité judiciaire.
 
Infractions concernées par la géolocalisation en temps réel. — L’article 44, X de la loi de programmation modifie d’abord les termes de l’article 230-32 du Code de procédure pénale relatif à la géolocalisation en temps réel.
À compter du 1er juin 2019, le quantum de la peine encourue pour les délits de droit commun, permettant de mettre en œuvre la mesure sera abaissé à 3 ans (au lieu des 5 ans actuellement). Il en sera de même dans le cadre de l’enquête douanière (C. douanes, art. 67 bis-2).
Est corrélativement supprimée, la dérogation spécifiquement prévue aujourd’hui au 1° du texte pour la fourniture de moyens aux auteurs et complices d’actes de terrorisme et pour l’évasion.
 
Durée de la géolocalisation en temps réel. — Sont également modifiées (art. 44, XI de la loi de programmation), à compter du 1er juin 2019, les dispositions de l’article 230-32 du Code de procédure pénale, relative à la durée des opérations.
Au cours de l’enquête de flagrance et en enquête préliminaire, la durée de droit commun de la mesure sera de 8 jours consécutifs.
La durée maximale sera portée à 15 jours consécutifs :
  • pour les infractions réputées flagrantes : mort suspecte (C. pr. pén., art. 74), disparition inquiétante (C. pr. pén., art. 74-1) et personne en fuite (C. pr. pén., art. 74-2) ;
  • en matière criminelle ;
  • en délinquance et criminalité organisées (C. pr. pén., art. 706-73 et 706-73-1).
À l'issue de ces délais, l’opération peut être renouvelée par le JLD, à la requête du procureur, pour une durée maximale d'un mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée.
La durée de l’opération au cours de l’instruction ou d'une information pour recherche des causes de la mort ou des causes de la disparition (C. pr. pén., art. 74, 74-1 et 80-4) est inchangée (durée maximale de 4 mois, renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée).
La décision du procureur de la République, du JLD ou du juge d'instruction est écrite ; elle n'a pas de caractère juridictionnel et n'est susceptible d'aucun recours.
La nouvelle version du texte instaure une durée butoir : en enquête ou au cours de l’instruction, la durée totale de l’opération ne peut pas excéder un an pour les infractions de droit commun, deux ans en cas de délinquance et de criminalité organisée.
 
Motivation de l’autorisation judiciaire. — La décision, selon le cas, du procureur de la République, du JLD ou du juge d'instruction devra, à compter du 1er juin 2019, être « motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires » (C. pr. pén., art. 230-33, mod. par art. 44, XI, 3° de la loi de programmation).
Pour le reste, pas de changement : la décision reste écrite ; pas de caractère juridictionnel (insusceptible de recours).
 

6) Interception des correspondances

 
Infractions concernées par les écoutes (instruction). — L’article 44, V de la loi de programmation modifie les dispositions de l’article 100 du Code de procédure pénale, en ce qui concerne le quantum de la peine encourue pour la mise en place des écoutes téléphoniques. À compter du 1er juin 2019, le seuil sera porté, pour les délits, à 3 ans d’emprisonnement, au lieu des 2 actuels.
 
Motivation des écoutes téléphoniques. — L’article 44, VI de la loi de programmation ajoute des précisions en ce qui concerne la motivation de l’ordonnance autorisant la mise en place de l’interception des correspondances. À compter du 1er juin 2019, l’article 100-1 du Code de procédure pénale sera complété. La décision prise en application de l'article 100 devra être motivée « par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires ». Elle devra également, comme aujourd’hui, comporter tous les éléments d’identification de la liaison à intercepter, l’infraction qui motive le recours à l’interception ainsi que la durée de celle-ci.
 
Écoutes téléphoniques sur la ligne de la victime. — Un nouvel alinéa sera inséré à l’article 100 du Code de procédure pénale à compter du 1er juin 2019 (art. 44, V, 2° de la loi de programmation). Ceci, pour prévoir qu’en cas de délit puni d’une peine d’emprisonnement commis par la voie des communications électroniques sur la ligne de la victime, l’interception pourra également être autorisée si elle intervient sur cette ligne à la demande de la victime.
 
Écoutes téléphoniques pendant l’enquête (censurées). — En revanche, les dispositions qui permettaient d’autoriser l’interception des correspondances, sur autorisation du JLD saisi par le procureur en enquête de flagrance (anc. art. 44, II de la loi de programmation), pour les infractions réputées flagrantes (anc. art. 44, III de la loi de programmation) et en enquête préliminaire (anc. art. 44, IV de la loi de programmation) ont été censurées par le Conseil constitutionnel. En autorisant le recours à ces mesures d’une part pour des infractions ne présentant pas nécessairement un caractère de particulière gravité et complexité et, d’autre part, sans assortir ce recours des garanties permettant un contrôle suffisant par le juge du maintien du caractère nécessaire et proportionné desdites mesures durant leur déroulé, le législateur n'a pas opéré une conciliation équilibrée entre l'objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infractions et le droit au respect de la vie privée et le secret des correspondances (Cons. const., 21 mars 2019, préc., § 138-147).
 
 

7) Accès à distance aux correspondances électroniques


Les articles 706-95-1 et 706-95-2  du Code de procédure pénale sont actuellement applicables en cas d’infractions relevant de la délinquance et de la criminalité organisée (C. pr. pén., art. 706-73 et 706-73-1). À compter du 1er juin 2019, ils le seront également en matière criminelle. 
Rappelons que cette mesure permet d’accéder, à distance et à l'insu de la personne visée, aux correspondances stockées par la voie des communications électroniques accessibles au moyen d'un identifiant informatique (e-mails notamment). Ceci, si les nécessités de l'enquête ou de l’instruction l'exigent. La décision est prise, par ordonnance motivée, par le JLD ou le juge d’instruction, à la requête du procureur. Les données auxquelles il a été permis d'accéder peuvent être saisies et enregistrées ou copiées sur tout support.
On observera que le projet de loi prévoyait un élargissement du recours à toutes les techniques spéciales d’enquête à toute la matière criminelle de droit commun. C’est notamment la raison pour laquelle le Titre XXV du Livre IV du Code de procédure pénale sera intitulé, à compter du 1er juin 2019 « De la procédure applicable à la criminalité et à la délinquance organisées et aux crimes ». Mais cette prévision a fait l’objet d’une censure constitutionnelle : en étendant leur champ d’application à toute la matière criminelle, « le législateur a autorisé le recours à des techniques d'enquête particulièrement intrusives pour des infractions ne présentant pas nécessairement un caractère de particulière complexité, sans assortir ce recours des garanties permettant un contrôle suffisant par le juge du maintien du caractère nécessaire et proportionné de ces mesures durant leur déroulé » (Cons. const., 21 mars 2019, préc., spéc. § 164). Seul le recours à l’accès à distance aux correspondances électroniques a été étendu à la matière criminelle (C. pr. pén., art. 706-95-1).

 
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Source : Actualités du droit